vendredi 25 décembre 2015

Noël

Dans un livre récent, une sorte de réponse à l'Étranger de Camus, intitulée Meursault, contre-enquête, l'auteur, Kamel Daoud, reprend le premier ouvrage en adoptant l'autre point de vue, celui de la victime, ou plutôt de son jeune frère.
On y découvre son deuil, sa colère, son impuissance, mêlés aux interrogations diverses qui accompagnent l'évolution de l'Algérie après son indépendance.
Parmi ces questions se pose bien sûr celle de la religion, que le narrateur rejette fermement :

(...) parmi tous ceux qui bavardent sur ma condition - cohortes d'anges, de dieux, de diables ou de livres -, j'ai su, très jeune, que j'étais le seul à connaître la douleur, l'obligation de la mort, du travail et de la maladie.(...) Donc, ouste ! Du coup, je déteste les religions et la soumission. A-t-on idée de courir après un père qui n'a jamais posé son pied sur cette terre et qui n'a jamais eu à connaître la faim ou l'effort pour gagner sa vie ?
C'est dit avec efficacité.
Mais justement, pour rencontrer Celui qui a voulu être aussi proche de nous qu'on peut le souhaiter, Celui qui a su réaliser cette communion intime dans l'effort et la souffrance jusque dans la mort, c'est aujourd'hui...


mardi 22 décembre 2015

Mon Universalis

Ce n'est pas vraiment un cadeau de Noël.
C'est la concrétisation inattendue d'un vieux rêve.
C'était une somme de savoirs qui déplaçait à la Bibliothèque Universitaire les étudiants pressés de consulter les précieux articles consacrés à leur domaine de travail du moment. On lisait l'article sur Proust, sur Platon, sur le Romantisme... On prenait des notes, on hésitait à photocopier le tout, on prévoyait de revenir pour lire tel et tel article indispensable...
Les précieux volumes occupaient un espace privilégié parmi les ouvrages de référence. L'Encyclopoedia Universalis, trésor hors de portée pour la bourse d'un étudiant, caution de sérieux et source d'informations dont on espérait beaucoup (en particulier pour améliorer les dissertations), trônait dans l'imagination au travail comme une Bible.
Puis les temps ont changé. Les études finies, on a renoncé à acquérir les précieux volumes en supposant que l'on aurait toujours accès (!) à une bibliothèque publique pour y revenir, et en se disant que l'usage domestique en serait peu fréquent. Un bon Grand Larousse Universel devait être plus accessible à une famille en pleine croissance.
Puis la révolution Internet a eu lieu. Jeunes gens et jeunes filles, lorsqu'une question épineuse les arrête, ne songent plus à sortir des rayons quelque pesant volume pour y promener un doigt et un regard interrogateur jusqu'à la bonne colonne de la bonne page. Désormais, c'est sur un clavier et un écran que doigts et regard se promènent.
Pour le meilleur sans doute, la somme de savoirs est maintenant accessible en ligne, dans toutes les langues, actualisés constamment par des spécialistes du monde entier...
Et qui sait ce qu'il va advenir des précieux volumes, dans les bibliothèques de France ?
En tout cas, à la bibliothèque du lycée français de Washington (où Myosotis a repris du service), l'Universalis tout entière, reléguée au rang de cale ou de support pour les expositions temporaires, était promise à la poubelle.
Mais cela ne pouvait être. Cela ne sera pas.
Grâce à la gentille compréhension de la documentaliste et avec l'accord amusé du Grand Chêne, les précieux volumes sont désormais installés dans le sous-sol de la maison, on leur a fait une place de choix parmi les Lego et le reste. C'est la plus belle opération de recyclage qui se puisse imaginer. Un happy ending, en quelque sorte. Ou peut-être un happy beginning ?




mercredi 18 novembre 2015

Actualité

"Et c'est là qu'intervient l'importance des textes grecs pour nous ; et ainsi s'explique que cette longue défense des valeurs garde un sens pour des lecteurs plus de vingt siècles plus tard. Les Grecs (...) ont décrit une expérience et défendu certaines valeurs qu'ils étaient les premiers à découvrir et qu'ils ont exprimées avec une telle netteté et un tel sens de l'universel que celles-ci s'imposent encore à nous (...).
Or, dans l'héritage de valeurs ainsi transmis, on peut dire que le refus de la violence tient la première place. La culture grecque se définit comme une recherche passionnée de tout ce qui peut mettre fin à cette violence considérée comme bestiale et indigne de l'homme.
Cette tendance profonde qui anime l'esprit des Grecs s'est manifestée en deux temps successifs : la découverte de la justice et la découverte de la douceur.
(...)
Les violences dans Athènes, et dans la Grèce en général, n'ont jamais cessé d'exister. Elles ont été constantes et parfois intenses ; mais elles n'ont pas pris le ton et la couleur que semble revêtir la violence dans notre monde ; et ceci suggère qu'il existait des forces capables de freiner, dans certains cas, la violence et de s'opposer à sa généralisation. Ces freins n'étaient pas seulement constitués par des règlements, par une surveillance, par un pouvoir de la cité. Il semble bien (...) qu'il faille chercher un peu plus loin, dans les tendances mêmes de l'esprit des gens. (...)
J'aimerais distinguer ici trois tendances profondes qui ont pu jouer : l'attachement vivace aux lois de la cité, un certain sens de la solidarité humaine et, plus profondément encore, un amour constant de la vie et de ses beautés."

Jacqueline de Romilly, la Grèce antique contre la violence, éditions de Fallois, 2000.

Et si on développait l'enseignement des Lettres Classiques ?


dimanche 25 octobre 2015

Antigone

Pas celle d'Anouilh, si fort marquée de Résistance et de révolte adolescente...
Celle de Sophocle, dressée de tout son être face à une loi inhumaine.
Le texte grec ancien a été traduit en anglais. Les personnages vêtus à l'occidentale se déplacent lentement dans un décor dépouillé, mais devant un écran où des vidéos font douter si l'on est au théâtre ou bien au cinéma.
Loin des amphithéâtres antiques où l'on représentait la marche inexorable du destin sous le ciel de Méditerranée, la scène du Kennedy Center accueillait cette pièce atemporelle derrière ses hautes façades modernes, sans regard sur les rives du Potomac parées d'arbres dorés.
Des milliers d'années après Sophocle, enrichie de tous les regards fascinés qui se sont posés sur elle au fil des époques, Antigone était bien là. Toujours indomptable, toujours frêle, toujours seule. Mais si vivante...


Et pour un heureux groupe d'élèves du lycée français, une rencontre avec Juliette Binoche a suivi la représentation.
Inoubliable Antigone. Inoubliable sans doute aussi Juliette Binoche. C'était un grand moment.

dimanche 18 octobre 2015

Jason

Il a 5 mois, il est entré dans notre famille hier, tout droit venu d'un refuge de la Humane Society (c'est le nom de la SPA ici) et déjà bien nommé. Il a conquis tout le monde par la puissance de son ronronnement et ses bonnes manières (propre tout de suite et capable de dormir la nuit !) :


Il est venu sans bagage mais il serait difficle pourtant de faire la liste de tous les bonheurs qu'il a apportés avec lui... Même le Grand Chêne prend le temps de le câliner, les rires fusent et les idées de jeux se multiplient...
Encore une fois, c'est un sage poète qui trouve les mots justes :
Je souhaite dans ma maison
Une femme ayant sa raison,
Un chat passant parmi les livres,
Des amis en toute saison
Sans lesquels je ne peux pas vivre.          
                               Guillaume Apollinaire

mercredi 23 septembre 2015

Un goût d'automne

Ce n'est pas une journée comme les autres, comme toutes celles qui passent en foule depuis fin août, au rythme retrouvé du travail, de l'école et des tâches quotidiennes.
La lumière du jour semble cuivrée, la chaleur sèche fait craquer les feuilles encore vertes pourtant sur les branches, les nuits sont froides et les matins brumeux...
Le calendrier, les fleurs de chrysanthèmes et les premières citrouilles aperçues çà et là parlent de l'automne.


On a beau se dire que le départ des deux aînés rend tout cela secondaire, que la venue du Pape (qui déplace les foules au coeur de Washington DC et complique l'accès au bureau du Grand Chêne) a bien plus d'importance... Voilà que ce matin l'automne s'impose et donne le ton : douceur, mélancolie, tant de soupirs prêts à éclore...

Mais soudain trois véhicules de secours viennent se ranger dans la rue de derrière, des hommes en bleu marine se hâtent vers la maison des voisins les plus proches : c'est la grand-mère qui a perdu connaissance, elle ne respire plus...
Sa petite-fille accueille avec un sourire pâle mes offres de service et l'expression de ma sympathie, avant de partir pour l'hôpital... Puis l'ambulance et les pompiers quittent en trombe le quartier redevenu très calme.

Le ton automnal est toujours là. Peut-être un peu plus profond. Moins doux. Mais si beau...

Pour cette vieille dame sur la civière de l'ambulance...
Pour tout ce qui blesse et taraude...
Pour les grands maux et les petits qui se bousculent dans ma tête...
Je veux que cet automne ait le goût d'un cadeau.

samedi 29 août 2015

The Appalachian Trail

On a traversé juillet en prenant soin de chacun (au sens latin de cura, soin et souci, une occupation à temps complet, de toutes nos forces, avec tout l'amour du monde). Le bilan est positif.
Au mois d'août, on est allé voir dans le New Hampshire s'il faisait moins chaud. C'était bien le cas, grâce à une quantité de montagnes, forêts et rivières avec cascades qui offrent des circuits de promenades charmants.
Mais au détour d'un sentier, ça peut devenir sérieux :



On se rappelle soudain que ces montagnes (baptisées du nom de présidents américains plus ou moins restés dans l'Histoire) font partie d'un ensemble naturel considérable, bien qu'érodé.
Et ce n'est pas seulement l'aventure qui appelle. C'est une porte sur autre chose, un autre mode de vie. Cinq mois de marche, généralement du sud vers le nord. Les vrais marcheurs (les walk through) commencent au printemps, au début de la fonte des neiges, et espèrent en avoir fini avant les premières neiges de l'automne.


Mais tous les marcheurs ne vont pas jusqu'au bout, certains ne commencent pas au début, on peut commencer ici et s'arrêter là, puis recommencer plus tard, ailleurs. Et ne pas terminer. Tout est possible. En tout cas, sur ce chemin-là souffle un esprit particulier.


Comme ce n'est pas un pèlerinage (Compostelle est hors de portée), c'est un espace ouvert à toutes les quêtes... On a eu la chance de trouver un best-seller qui aborde adroitement le sujet (un vrai bonheur pour une lecture d'été)



... Et voilà que ce livre va devenir un film d'ici quelques semaines... C'est Robert Redford la tête d'affiche !



On va donc aller au cinéma dès la sortie, évènement rarissime, c'est décidé, même si le Grand Chêne croule sous le travail dans son nouveau poste.
Dans l'impatience, on se demande pourtant : le film sera-t-il à la hauteur du livre ? A-t-on su préserver l'humour et la profondeur des réflexions développées au fil des étapes par son auteur ?
Nous laissera-t-il sur notre faim ou bien heureux d'avoir pu passer encore un moment à rêver sur ce trail qui conduit d'ici (il ne passe pas très loin de Washingon DC) au Maine, là-haut, à la frontière du Québec où notre Jeune Sapin chéri vient de partir commencer ses études...?


dimanche 19 juillet 2015

Il vient d'avoir 18 ans...

D'un anniversaire l'autre, les semaines passent vite et l'on se souvient que notre Jeune Sapin est né (2 ans plus tard) à la date qui avait été prévue pour Mademoiselle Bee. Les bébés qui arrivent un peu en avance semblent faire un cadeau à leur Maman, quelque chose comme : "Puisque tu te sens si lourde, puisque tu as un peu de mal à te déplacer, à respirer et à dormir, me voilà !"
On est loin désormais de ces premiers temps, dont les moments marquants reviennent dans les conversations, parés de nuances tendres (Tu étais si mignon), épiques (Comme tu t'agitais dans ta poussette quand tu voyais une voiture sortir d'un garage) ou dramatiques (Et la fois où tu as arraché une pleine poignée de cheveux à ta grande soeur)...
Les évènements du jour ont bien réflété les préoccupations d'un jeune homme du XXIe siècle : accomplir une partie de Dieu sait quel jeu en ligne, en équipe avec d'autres joueurs (pas très doués cette fois, d'après les commentaires saisis au vol), trouver des solutions au plantage de l'ordinateur portable, télécharger un nouveau jeu...
Heureusement, pendant ce temps-là, Mademoiselle Bee et Myosotis préparaient un gâteau et des bougies en nombre suffisant, et Petit Lierre se chicanait avec Petit Bouton d'or pour savoir qui apporterait les cadeaux. C'est que le monde virtuel est peut-être attrayant, mais il ne peut pas remplacer la saveur et la joie d'un repas en famille...


jeudi 9 juillet 2015

Votre fille a 20 ans...

Mademoiselle Bee vient de souffler 20 bougies. Elle est grande, belle, pleine de qualités qui causent autant de surprises que d'admiration à ses parents ravis (le plus souvent).
Et après 2 années passées loin de sa famille, elle a réappris à en apprécier les bons côtés. Elle se montre donc affectueuse et plus attentionnée, mais toujours très directe.
Ainsi, après l'achat de fleurs que l'on espère conserver longtemps (les daims ne les aiment pas) et que l'on se réjouissait beaucoup de planter sur-le-champ, la demoiselle a-t-elle remarqué gentiment :

"T'es une jardinière dans l'âme, toi !
- Euh... C'est surtout que je suis très contente quand je plante des trucs qui ne meurent pas...
- Bon, t'es pas douée, mais ça change rien..."
Toujours très directe.


dimanche 28 juin 2015

Après la pluie...

D'autres orages viendront, c'est certain. Néanmoins, après des jours où le jardin a été battu de pluie et d'excessive ardeur (en alternance et avec une égale intensité), il est bien agréable d'aller prendre soin des plantes et fleurs que l'on essaie d'y faire pousser.
Les pieds de lavande ont un peu baissé la tête, mais les daims n'y touchent pas et les abeilles y butinent tranquillement. Le thym va très bien lui aussi (pour les mêmes raisons)

 
Les lys de Pâques (replantés l'année dernière et bien plus tardifs dans leur floraison naturelle que dans les pots où ils avaient été achetés pour décorer l'église) ont un peu souffert mais résistent étonnamment :


Un sachet de graines de cosmos a jusqu'à présent donné une fleur. C'est mieux que rien :


 Trois sachets de graines de fleurs sauvages variées, soigneusement semées sur une parcelle que le Grand Chêne ne devrait pas tondre (mais il a oublié les premières fois cette saison), ont donné deux oeillets roses et une black-eyed-susan, parmi de hautes herbes dont on ne sait pas ce qu'elles peuvent donner, si on leur laisse une chance :


(Pas de photo des capucines, qui ont apprécié leur emplacement dans une grosse potiche mais qui n'ont pas supporté les averses).

La conclusion de tout cela ?
C'est simple mais réconfortant. Le petit jardin comme l'autre a été soumis à de rudes épreuves ces dernières semaines.
La pluie est tombée, les torrents sont venus, les vents ont soufflé...
Mais on est toujours là, on redresse doucement la tête et on continue, puisque c'est la vie. Et ce qui est donné, pour fragile et modeste que cela paraisse, n'en est pas moins beau.
On ferme les yeux sur un sourire et l'on se dit qu'il n'est pas mauvais de marier le carpe diem avec la recommandation de bâtir sur le roc.

samedi 25 avril 2015

Petit Lierre à la Banque Mondiale

Encore une heureuse tradition américaine :
Take your child to work Day.
Une journée pendant laquelle les enfants d'âge scolaire sont autorisés à ne pas aller en classe, pour suivre Papa ou Maman sur son lieu de travail et voir enfin où se passent ses journées...
Alors Petit Lierre a suivi le Grand Chêne à la Banque Mondiale.
La Banque Mondiale, c'est immense, des milliers de gens y travaillent à des projets complexes pour aider les pays pauvres du monde entier.



On avait prévu des activités pour les petits visiteurs : des bricolages, la visite du centre de sécurité, la visite des vastes couloirs peuplés d'oeuvres d'art variées...


... et même une rencontre dans le grand hall avec le Président de l'institution, Mr. Jim Yong Kim, venu tout exprès montrer son tee-shirt "End Poverty" et sa bonne volonté.
Mais le reste du temps, il fallait compter sur la patience et la disponibilité du Grand Chêne pour s'occuper de son petit garçon.
C'est là que Myosotis est intervenue : Petit Lierre enchanté a pu profiter d'un repas au restaurant de la Banque avec ses 2 parents pour lui tout seul.
(Le restaurant de la Banque Mondiale est un lieu étonnant où l'on trouve des plats de tous les continents : les Japonais comme les Marocains ou les Pakistanais peuvent y acheter de la nourriture familière, ce qui les aide sans doute à s'adapter à Washington DC... Petit Lierre a choisi un cheese-burger avec des frites.)
Après cela, on a raccompagné Papa jusqu'à son bureau pour lui permettre de reprendre le travail interrompu, avant de rentrer en métro avec Maman...

Quel souvenir Petit Lierre gardera-t-il de cette journée ?
Probablement rien de spécial.
Par contre, sa copine Norah a accompagné son Papa dans l'entreprise où il dirige la fabrication de muffins, et elle a pu l'aider !

Petit Lierre aime beaucoup les muffins...

mardi 7 avril 2015

100 %

Petit Lierre est français et américain. Il parle encore français à la maison, il apprend à lire et à écrire sa langue maternelle (en concurrence avec les apprentissages de l'école) et il ne fait pas tout comme ses petits camarades... (En particulier, il prend ses repas assis à table et il obéit généralement à ses parents.)
Mais ce soir, rayonnant de bonheur, il a passé une heure et demie à pratiquer une activité 100 % américaine : son premier entraînement de baseball

Un coach et deux assistants (c'est-à-dire trois papas) encadraient la petite équipe. Dans une atmosphère détendue (presque désordonnée), les règles étaient simplement rappelées quand l'occasion se présentait et chacun enfilait son casque ou son gant au bon moment. Les petits prenaient leur place, changaient de rôle, faisaient ce que le coach attendait d'eux, et à chaque balle (ratée ou pas) les félicitations fusaient, parce que le coach trouvait quelque chose à valoriser, dans le geste ou dans l'attitude...
Malgré la pluie printanière qui menaçait (et qui a fini par tomber), l'unique maman de service s'est laissée conquérir par la belle humeur ambiante.
Enfin, le coach a rassemblé sa petite troupe pour le rituel de conclusion. En cercle, on a répété l'essentiel : first rule, laisser parler le coach ; second rule, s'amuser ; third rule, manifester un esprit sportif et positif ; fourth rule, écouter ce que dit le coach.
Il y aura des matchs contre d'autres équipes, on fera des efforts pour maîtriser la technique, tous les garçons seront invités à se surpasser, mais ce sera toujours avec un sourire, encouraging, et "Go Rockies !" (les Rockies, c'est donc le nom de l'équipe des 7-8 ans...)
Il faut admettre que cette façon positive de procéder a du bon. Petit Lierre tout mouillé de pluie et de transpiration n'a exprimé qu'un regret, il a trouvé cette séance beaucoup trop courte. Et sa maman ne l'a pas contredit... Elle a tout juste eu le temps de commencer la lecture du "Baseball pour les Nuls" qui devrait lui permettre d'apprécier pleinement cette nouvelle saison.

samedi 4 avril 2015

Le Grand Silence

C'est ainsi que la Tradition présente ce Samedi Saint.
Un jour d'attente...
Tandis que les nouvelles les plus horribles s'accumulent...
Tandis que les Chrétiens sont confrontés à la violence du monde...
Tandis que tant de gens oublient, délaissent ou nient la part divine de l'Homme...
Un jour d'attente avant...


mardi 17 mars 2015

Le barber de Rockville

Les Américains laissent les dames aller chez le coiffeur et profitent des tarifs avantageux du traditionnel barber. La partie masculine du Petit Jardin a vite adopté cette pratique économique et va une fois par mois environ s'y faire faire une coupe rapide (et très convenable).

Dans cette boutique sans fioriture, on attend son tour en regardant du sport et des news à la télé, ou en feuilletant des magazines qui présentent des voitures avec des décolletés avantageux, et des publicités qui affirment : "Mais si, prenez une douche avec du savon, votre petite amie sera contente..."
Il faut cependant être attentif car le barber peut faire des excès de zèle et Petit Lierre (que le Grand Chêne avait un jour perdu de vue pendant leur coupe respective) est revenu une fois avec si peu de cheveux sur la tête qu'il n'a pas eu besoin d'y retourner le mois suivant...

Tout allait bien, jusqu'au jour où notre Jeune Sapin y est allé seul et a perdu son ticket de stationnement... Il a eu l'idée malheureuse de forcer le passage derrière une autre voiture pour quitter le parking, s'est rendu compte que ça ne marcherait pas quand la barrière s'est refermée sur lui, a voulu reculer et est allé heurter un pick-up garé non loin de là...
Quelle émotion au téléphone, quand Myosotis a entendu sa voix annoncer : "Maman, j'ai eu un accident !" Heureusement, il n'y avait que des dégâts matériels (sérieux mais la voiture roulait encore). On a rassuré (ça arrive à tout le monde...), on a réconforté, on a indiqué la marche à suivre : demander de l'aide pour sortir du parking, laisser nos coordonnées sur le pare-brise du pick-up abîmé, puis rentrer doucement.
Ici intervient de nouveau le barber. Cet individu douteux a refusé de donner de quoi écrire à notre Jeune Sapin, au motif que "si tu laisses ton nom, il faudra payer !" et lui a fait quitter le parking en vitesse !
Myosotis a donc téléphoné au gardien du parking et signalé l'incident, en laissant toutes les informations utiles pour que le conducteur du pick-up n'aille pas entreprendre une action pour délit de fuite... 
Mais la colère grondait, à l'idée qu'un adulte (a priori raisonnable) puisse donner de tels conseils à un garçon de 17 ans... Myosotis fort agitée a donc déclaré bien fort à ses enfants qu'on avertirait le Grand Chêne (alors absent) et qu'on changerait les habitudes : "On n'ira plus chez ce barber !"
Or Petit Lierre, très intéressé, n'avait rien perdu de toute l'affaire et avait suivi pas à pas sa Maman au téléphone, puis gesticulant dans la cuisine. Il a bien senti la colère et le subtil désir de vengeance contenu dans cette promesse de changement, mais il s'est laissé induire en erreur par une similitude phonétique intrigante. Il a donc demandé, persuadé sans doute que l'on préparait une expédition punitive sanglante : "Dis Maman, ça veut dire quoi plucher le barber ? On va lui faire quoi ?"

mardi 3 mars 2015

La neige, la neige, toujours recommencée...

Voilà notre huitième hiver en terre américaine. C'est parfois très joli.


 Au carrefour des influences glaciales du nord et tropicales du sud, huit saisons imprévisibles (les services météorologiques ne cessent de le répéter en tentant leurs prévisions), toujours différentes des précédentes.


Myosotis a appris à ne pas ranger les vêtements d'hiver, à laisser les luges et les pelles à neige dans un endroit accessible, à remplacer les pull-overs par des vestes ou des châles faciles à mettre ou enlever en un tournemain.
Le Grand Chêne a appris qu'il ne faut pas tenir compte de la date pour décider d'arrêter le chauffage, qu'il vaut mieux vérifier sur Internet avant de partir si le métro fonctionne normalement et que les effets de la pluie verglaçante peuvent être spectaculaires.


Les plus jeunes savent qu'il ne faut pas sortir de son lit avant d'être assuré de l'ouverture des écoles, qu'il y a un temps pour rester inerte devant un écran et un autre pour sortir déneiger chemin et trottoirs, et que certaine qualité de neige n'est bonne que pour les batailles devant la maison.

Après de longues années de service, le canard de bois qui ornait la terrasse a baissé les ailes et fini sa carrière dans la cheminée, en janvier. On a donc décidé de le remplacer par un autre presque identique, acheté pour la Saint Valentin, dont on s'est promis de prendre soin.
Au mépris des expériences passées, on voulait attendre qu'il fasse beau pour le mettre en place.
Il a fait beau.



Mais pas très longtemps.


L'année dernière, la tempête finale de la saison a eu lieu le 30 mars. Comment savoir ce qui arrivera cette année ?
Une seule certitude : pas de place pour la monotonie.

mardi 24 février 2015

Un mot d'enfant

Petit Lierre est bien présent dans toutes les conversations familiales et comprend plus de choses que nous ne pensons ou que nous ne voulons partager avec un petit garçon de 7 ans...
Et quand il ne comprend pas ou quand il veut rappeler qu'il est bien là, il multiplie les questions parfois hors de propos. C'est de son âge.
Néanmoins, à la suite d'un QUOI ? particulièrement vigoureux et malvenu, il s'est entendu répondre un peu sèchement : d'abord, qu'il n'était pas concerné, ensuite que l'on ne doit pas dire QUOI, mais COMMENT.
La conversation reprenant son cours, Petit Lierre est de nouveau intervenu avec vigueur en lançant un puissant POURQUOI ? auquel il n'y avait rien à répondre...
Devant le regard un peu noir de sa mère contrariée d'être interrompue une fois de plus, il a donc prudemment tenté une modification : POURCOMMENT ?

lundi 16 février 2015

White out

C'est la même chose qu'un black out, mais c'est le contraire. Tout est blanc.
Il tombe une neige fine et abondante qui colle partout et le vent souffle dans tous les sens. Il soulève des nuages de poudreuse qui viennent se coller aux carreaux des fenêtres, des deux côtés de la maison. Le sol est blanc, le ciel est blanc, l'air est blanc...
Rien de bien grave, quand on y pense. La chute de neige en elle-même dure peu de temps, la poudreuse continue à voler en tourbillons et le vent sculpte des vagues gracieuses dans des endroits choisis, mais les routes ne sont pas vraiment encombrées. Rien à voir avec les quantités de neige et de glace qui ensevelissent Boston, et plus au nord...
Notre vrai souci, c'est la température, une fois de plus. On est bien d'accord sur le fait que 32°F = 0°C. Alors évidemment, 16°F = -9°C. C'est logique. Mais que fait-on lorsque la température prévue est de -3°F ? On obtient -19.4°C, mais ce n'est pas sérieux...
Ici, ce n'est pas l'Alaska ou le Minnesota... On reçoit les influences humides et chaudes du Golfe du Mexique et le froid qui descend du nord, c'est entendu, mais toutes ces influences associées composent un mélange varié qui nous épargne l'ennui, voilà tout. Nul besoin de ces excès...
Pourtant, c'est déjà arrivé : cette photo du Washington Monument date de 2010

Un autre white out...
Est-ce qu'il faisait aussi froid, cet hiver-là ?
Je ne sais plus... Il y a grand blanc dans ma mémoire...

mardi 27 janvier 2015

Des minutes immenses

Soir de repassage. On y va méthodiquement, en essayant d'être efficace mais de limiter les faux plis sur les chemises du Grand Chêne.
Et soudain, un troupeau de pachydermes dévale l'escalier, puis Petit Sapin tout hérissé, rouge et les yeux brillants, envahit l'espace de repassage et me serre dans ses bras en criant :

Je suis admis au Honors College de UMD !!!
C'est visiblement une bonne, très bonne nouvelle, je participe au mouvement (d'ailleurs, c'est plus prudent) mais je me demande quand même : UMD, qu'est-ce que c'est, déjà ?... Ah oui, University of MarylanD !)
Mon grand ! C'est magnifique, formidable !
Il continue à sauter en me faisant tourner avec lui (sa joie est contagieuse, mais il n'y a pas beaucoup d'espace, en fait, près de la table à repasser... Et je cherche à me souvenir... Honors College ? On en a déjà parlé ? Qu'est-ce que c'est au juste ? Je risque une question :
C'est vraiment génial... Et on y étudie quoi ?
Je sais pas ! C'est super !!!
Alors le plus important s'impose à mon esprit : il a une réponse pour l'année prochaine, dans ce système si complexe des universités américaines, il a enfin une certitude, et c'est un appui solide. Il peut être content, d'autres réponses viendront mais celle-là suffit à balayer bien des nuages...
Emporté par son élan, après avoir vérifié que je tenais encore sur mes jambes, il repart vers son ordinateur pour échanger des nouvelles avec d'autres...
C'est alors seulement que je réalise, rendue à mon repassage, toute la joie du moment. Ces minutes de bonheur-là s'étirent jusqu'à devenir immenses, pas loin de l'infini...

Elles y rejoignent d'autres minutes précieuses, vécues deux ans auparavant : en allant assister à son conseil de classe, j'ai vu Mademoiselle Bee courir vers moi du bout du couloir du lycée, ses cheveux encore blonds déployés comme des rayons autour de son sourire éclatant, et elle m'a prise dans ses bras en criant :
Je suis admise à Sciences Po !
Là, je savais bien de quoi il était question, je n'ai pas eu besoin de temps pour comprendre et je n'ai pas dit grand-chose... Car tous les efforts déployés, les cours supplémentaires tard le soir et la tension de la préparation, tout cela est retombé sur nous comme une heureuse averse...
Les embrassements vigoureux de la demoiselle accompagnaient mon émotion (il a fallu commencer les larmes aux yeux le conseil de classe...) tandis que ces minutes de bonheur se gravaient en moi, immenses, pas loin de l'infini...


dimanche 4 janvier 2015

Pour commencer 2015

Après la magie d'un Noël familial et paisible, la douceur d'un réveillon tout aussi familial et presque aussi paisible (il a fallu attendre Petit Sapin parti jouer de la musique pour une bonne cause en début de soirée) et la gourmandise rituelle de la galette des Rois (ça y est, on sait trouver les ingrédients pour la faire comme on l'aime...), il n'est pas trop tard pour envoyer de bons voeux et d'affectueuses pensées...
Mais au passage, on voudrait partager le bonheur d'une soirée au théâtre qui a comblé Myosotis et son Grand Chêne :


Le divorce en question, c'est l'abîme essentiel qui sépare le Mal et le Bien.
C.S. Lewis met en scène un narrateur embarqué à bord d'un bus avec des passagers plus ou moins sympathiques. On comprend peu à peu qu'ils sont en route vers le Ciel, mais chacun est encombré de préjugés et de certitudes qui compromettent le voyage. Chacun bénéficie pourtant de l'intervention pleine de sollicitude d'un être lumineux envoyé à sa rencontre... Tout semble bien simple, si l'on écoute ces guides bienveillants, mais pour les suivre il faut franchir un pas décisif : renoncer à son lézard familier (symbole de bien des choses...), renoncer à l'obsession de la renommée, à un amour exclusif, à l'exercice du pouvoir...
Le narrateur très troublé voit défiler plusieurs personnages et reçoit avec un soulagement mêlé de stupéfaction les explications que lui donne l'être lumineux envoyé pour lui. Puis il se réveille...
C.S. Lewis n'avait pas écrit pour la scène. Cette adaptation laisse une large place à un écran géant, en arrière-plan, pour donner à voir la ville pluvieuse qui figure l'Enfer, la silhouette du bus allégorique et le beau Ciel bleu déployé sur un somptueux décor de montagne...
La technologie fait ainsi alliance avec le génie du texte pour guider le spectateur le long du chemin de conversion de l'auteur lui-même.
Les bonnes résolutions qui s'ensuivent ?
D'abord, je me méfie de mon lézard familier...
Ensuite, je m'ouvre aux merveilles de la technologie.
Enfin... J'attends mon bus en lisant C.S. Lewis.